i)
J’ai gagné un canapé rosso, de jolis tableaux de l’art contempo, un mignon TV dont j’aurai pas besoin, et un appartement come a casa : pas tellement nouveau, avec moins d’espace mais plus de choses et de trace de vie de je ne sais qui.)
J’ai perdu une fenêtre face à la ruine, là où je contemple le ciel, la lueur du crépuscule, la ruine ; j’ai perdu une chambre où j’entends le vieux en haut chanter et disputer avec sa femme : ma collocatrice disait que c’était un fou, qu’il se levait au 5hrs et ne dormait qu’à 2 hrs.
J’ai perdu un balcon où je regarde les gens âgés sur le leur, du bâtiment à côté : une dame élégante, vieillie, portant de belles robes de chambre, étendant les vêtements chaque dimanche après-midi presqu’ aux mêmes heures ; un vieux monsieur qui prend le dîner sur le balcon avec sa femme ; un vieux couple sur le balcon au 2e étage : je les vois assis sous le soleil, souvent en silence. J ’ignore ce qu’ils voient ; ils ont un teint serein, un regard confus. Des fois, je les entends rire, quand une voix féminine enrouée, venant du bas de chez moi, leur raconte des anecdotes. C’est une sorte de rire dont l’énergie perdue, mais d’une fraicheur émouvante.
J’ai perdu l’habitude.
ii)
Pour déménager, il faut nettoyer l’appartement. En Chine, au lycée comme dans l’université, on ne connaissait que le balai, le torchon, de l’eau. Dans l’appartement que j’habitais, il n’y avait pas de balai mais un aspirateur ; le torchon indispensable, accompagné de divers détergents pour sol en carreaux de grès cérame ou pour le bassin. Dans l’appartement que j’habite, c’est évidemment bien équipé, on trouve les outils de nettoyage du plus artisanal au plus post-industriel.
Pour ranger des choses, il faut se laisser ranger par des choses. Il faut savoir où c’est la caffettiera, où la teiera ; pour faire le thé, à prendre d’abord le bouilloire ensuite la théière avant de trouver la tasse correcte : il faut savoir distinguer la tasse pour l’espresso, pour le café au lait, pour le thé ; le verre pour le whisky, pour de l'eau, pour beaucoup d’eau.
Pour battre un oeuf, j’avais un fouet à main ; il n’y en avait pas dans ma nouvelle cuisine, mais j’ai vu un mixeur. Alors c’est branché. En écoutant son bruit bien bref, je tombe dans l’hallucination en me croyant une heureuse esclave. J’ai entendu le murmure de Valéry, qui confirme que l’homme tourne à sa plus complète servitude avec la modernité, que le confort nous enchaîne. Heidegger m’a soufflé aussi son angoisse de l’être, il croit que les pro-progrès technique qui aspirent à une bonne condition de l’être, de même que ceux qui marquent nos âges avec de différentes science de la techno, de l’artisanale à la post-industrielle, n’ont rien compris sur leur être ; que la techno nuit à son Dasein.
Je commence à imaginer une longue période de la vie d’une famille dans cette cuisine, au début tout neuf avec peu de choses, comme cellle que je viens de quitter ; puis cet espace se remplit avec de plus en plus de petites choses, et ces petites choses feront les événements de cette famille : un couvert complet comme cadeau de mariage, une série de tasses à café offerte par une fille à sa grand-mère pendant le Noël ; il faut encore acheter trois verres pour les invités ; ce tablier est joli, elle le veut ; c’est le solde, il a acheté un mixeur pour lui plair et pour profiter du solde. Etc.
Durant un court séjour, comme celui que je viens de passer, l’intérêt reste à ce que l’on découvre et joue une vie en tant que telle. Dans la chambre, on est étudiante ; dans le couloir, on est femme de ménage ; dans le salle de bain, on est femme ou ménagère ; dans la cuisine, on est hôtesse- cuisinière.
Mais pour un séjour très court, ça complique. Ca va néantiser mes vingt jours.
iii)
Dans 20 jours je vais déménager dans une autre ville. Dans 50 jours je serai back in Francia. Dans 70 jours je recommencerai la vie à Perpignan.
J’ai réussi à ranger la vie en une heure et demi.
J’ai appris à laisser ce qui me plait et que je ne peux emporter avec moi.
J’ai osé l’oubli et l’indifférence.
(L'oeuvre d'un peintre anonyme, j'y passe devant tous les jours, j'y reste chaque fois deux secondes.)
2 commentaires:
Le piccole cose che cambiano.
Très amusant ce post, invoquer Heidegger à propos d'un batteur à œufs, c'est digne de mon blog balivernes et philo, j'y ai fait d'ailleurs une légère allusion.
Dans cinquante jours je serai à Hong Kong puis au Vietnam puis à Hong Kong de nouveau, je ramène mes petits enfants chez leurs parents et j'en profite pour voir un pays que je ne connais pas encore.
Tanti auguri per le ultime giornate che passerai in Italia, e, pure, per le tue studie.
Ah Vietnam..voilà un pays que j'ai voulu visiter depuis le lycée..Surtout bon séjour là pour profiter de la chaleur,l'humidité,la douceur des gens et les payayas!!
In fatti gli studie quì mi hanno molto piaciute; io andrò forse a Siena per la tesi con il giro dei dipinti e anché in campagna,se tutto va bene...Per il momento non vorrei ritornare in Francia..Hihi
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