Joyeuses fêtes à toutes et à tous.
Tant qu'il y a toi, il y a une voie.
Les rouleaux tibétains, les Tang-Ka, ou Thang-ga en tibétain, restent les oeuvres les plus impressionnantes de toute l’exposition, à mon sens. Ce sont les images de différents Bouddhas, peints selon chacune de leurs légendes. Le tout est brodé à la main(pour la plupart) ou peint sur un étoffe en cotton à la base d’une maquette, puis encadré d’étoffe, avant que les rouleaux ne soient ajoutés sur le haut et le bas. C’est l’abondance de signes et de symbols qui se perçoivent dans une telle oeuvre, on dit que sur un seul Thang-ga (
En revanche, j’ai pensé encore une fois à la peinture italienne, voire byzantine. C’est intéressant de voir que les religieux de l’Est comme de l’Ouest ont tous cherché un effet de divinité, ou de scintillement, pour être mondain. Les italiens du XIVe siècle ont su utiliser largement l’huile en tant que matière, ce que que leur ont initié Van Eyck (si ma mémoire est bonne), afin que les figures des dieux se reflètent dans les lueurs des bougies ou dans les lumières naturelles des église ; les Tibétains utilisent quant à eux les fils d’or pour broder les toits d’un temple, l’aura d’un Bouddha, etc. On reçoit alors les mêmes effets visuels, quand on aperçoit les statuts à distance. Sans parler que les peintres italiens de
Ce qui est très dommage dans la contemplation des Thang-ga, c’est que les explications sont trop rudimentaires pour qu’on puisse comprendre, même grossièrement, ce que veulent dire les différentes couleurs employées sur le statut d’un Bouddha, par exemple. De même, comme la légende du rouleau médecin est écrite en tibétain, sans titre ni résumé, je ne peux que lire graphiquement pour admirer l’illustration des principes de la médecine tibétaine autour de cinq éléments fondamentaux : comment se varient les cinq éléments dans notre vie et comment maintenir leur équilibre dans l’alimentation, dans l’exercice sexuel comme dans la prolifération.
Il est vers la fin de l’après-midi, et donc vers la clôture de l’exposition à Shanghai. Les effectifs se montrent mous, commençant à ranger peu à peu les oeuvres exposées. Pour la première fois, j’ai pu voir les gens décrocher et empiler les tableaux, les écarter les uns des autres avec un étoffe de velours. Sur le côté, plusieurs jeunes moines sont en train de décrocher soigneusement un énorme Thang-ga sous la commande d’une femme âgée tibétaine. Je suis allée demandé l’un d’entre eux : « vous allez à quelle ville prochainement pour la tournée de l’exposition ? » Lui répond : « Ting bu dong. / Comprends pas. », avec la réserve et la timidité qu’on perçoit chez bien des tibétains du peuple. Je pose alors la question à la femme âgée. « Rentrons à Lhasa./Hui Qu
Ca me paraît assez curieux d’entendre qu’il ne convient pas de faire la tournée à Pékin. Au début, je me demandais si ce genre d’exposition ne serait pas problématique aux yeux du gouvernement, mais non, j’ai lu dès l’entrée de la salle l’introduction de l’association CAPDTC qui s’occupe de l’art et la culture du Tibet et dont le siège se trouve justement à
En ce cas, qu’est-ce qu’on peut envisager sur les événements culturels en Chine ? Il y aurait peut-être aussi une « 3e voie », pallèle à celle du développement économique, dans le secteur culturel : si par hasard le gouvernement dit oui et donne les subvensions pour certaines activités culturelles (dont la restauration d’une partie des oeuvres d’art tibétaines, il faut le dire), tant mieux, on serait alors sous un système semblable à celui de la politique culturelle française qui donne les soutiens à la culture (hélas beaucoup moins qu’avant en ce moment) ; pour le reste, il faudrait emprunter une méthode anglo-saxone(dite libéraliste ?) et prendre l’autonomie pour chercher le financement en convainquant les riches cultivés.
Humm...faut-il dire alors qu’on est heureux d’être Shanghaien pour accueillir les oeuvres de qualité qui sont politiquement sentibles ? Mais déjà, on m’a déconseillé de parler de la politique. Je me contente alors de regarder les gens renrouler soigneusement le gros Bouddha, et ce geste même aurait porter un sens religieux pour eux. Entre temps, une sentence m’est survenue dans la tête...La souvenez-vous ? « Fo Tsi Tsaï Sin Tchong », la prononciation française que Ben m’avait apprise : « Le Bouddha est en soi. »
Source photos: le masque tibétain, la pierre Ma Ni ;
Pte gallerie des objets exposés: Ji Xiang Ha Da
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Infos pratiques:
- Site de l’ONG organisatrice CAPDTC (China Association for Preservation and Development of Tibetan Culture): (En/Chi) http://www.capdtc.org/
- Site sur la culture tibétaine : (En/Chi/Tib) http://en.tibetculture.net/
- Site de l’exposition à Shanghai : (Chi) http://www.jixianghada.org/
Le tarif normal est de 60 yuan, c’est bien le prix européen et ça revient quand même un peu cher, car l’on n’avait pas d’habitude de payer autant pour une exposition ici. Ce serait aussi une barrière invisible quant au choix du public: les personnels administratifs, les autorités de l’art et de la culture et les principaux medias qui auraient forcément reçu les tickets offerts ; les gens internationaux, les gens cultivés, dont les jeunes employés et les étudiants. Autrement dit, les potentiels chercheurs ou touristes ou/et amateurs du Tibet et de sa culture. Autant espérer que ces bénéfices aidera à la conservation et à la transmission des patrimoines tibétains.
Si l’on veut y aller juste parce que l’on croit pouvoir découvrir ce qu’est le Tibet, ça risque d’être décevant, du point de vue voyageur pas tellement touristique ; et j’ai compris cela avant de m’y rendre, en lisant les infos et les photos sur l’Internet. Déjà à l’entrée, on tombe sur une petite installation des Feng Ma Jing Fan, enseignes qui flottent dans les vents de plateau et sur lesquelles sont écrites les textes religieux : « ong-ma-ni-ba-me-hong/rõ », les mêmes textes sont gravés sur les pierres Ma Ni que j’évoquerai plus tard. (Je vous invite à les murmurer devant le feu de la cheminée du Noêl pour s’acquérir de la quiétude et la fortuna d’origine tibétaine, en plus des cadeaux du Réveillon
Je parle de ça moins comme une critique que comme un constat de ce que j’ai resenti, je me rappelle que lors de ma visite du Louvre après mon séjour en Italie, en regardant les peintures religieuses italiennes illuminées des lumières des lampes, je déplorais la disparition du charme ambiant des tableaux qui se trouvaient jadis sur les murs des églises et qui nous inspiraient un sentiment mystique sous la lumière du jour qui pénère dans l’espace de la vénération. C’est un paradoxe inévitable d’exposer les choses liés à la vie religieuse (et nomade) dans un contexte laïque (et civilisé) ; néanmoins, un compromis n’est pas impossible, il serait peut-être mieux que l’on organise par exemple la re-présentation des (mini) foires tibétaines, comparables aux foires médiévales qui ont régulièrement lieu en Midi-Pyrénées.
Les organisateurs ont pourtant pensé au principe du spectacle, on peut voir ainsi plusieurs stands de démonstration où quelques Tibétaines travaillent sur un métier à broder, quelques moines qui montrent l’art de la construction d’un grand temple sablé (ou plutôt une sorte d’arène? Quelle magie de mot...), dit « dul-tson-kyil-khor » en tibétain. Celui-là est l’une des meiveilles que l’on peut rencontrer lors de la visite. Dans la matière qui sert à la construction d’un temple sur un plateau modelé, il n’y a pas que les sables, c’est un mélange de grains de l’or, des pierres précieuses, des pétales, du riz et des sables blanc. C’est avec ce mélange que, lors des cérémonies religieuses, les moines parviennent à construire un temple coloré et scintillant, dont la structure ordonnée, transformée du chaos, synthétise et symbolise au grand celle d’un pays et d’un territoire, au petit celle d’un corps humain. Le processus de la construction est en même temps un exercice religieux pour ces moines : « la prospérité mondaine, ce n’est qu’une poignée de sable /繁华世界,不过一掬细沙. », dit ainsi le maxime bouddhique. En effet, quand un coup de vent va tout emporter, il ne restera que le néant, ou son contraire, l’éternité.
(source des deux photos: ICI)
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Infos Pratiques:
- Site de l’ONG organisatrice CAPDTC (China Association for Preservation and Development of Tibetan Culture): (En/Chi) http://www.capdtc.org/
- Site sur la culture tibétaine : (En/Chi/Tib) http://en.tibetculture.net/
- Site de l’exposition tibétaine à Shanghai : (Chi) http://www.jixianghada.org/
Nous deux ont voulu aller voir Su Zhou He, Neige et moi. C’est parfait. Neige a toujours été attirée par le film de Lou Ye, Su Zhou He, le mélange d’une légende d’amour avec la nostalgie tranquille d’une vie désordonée, brute et bruyante, résolue ; tout sauf l’espoir, qui se perd dès le début du film : «-Si un jour je m’en vais, t’irais me chercher comme Ma Da (ie : le Moteur, nom du héros) ? -Sûrement. -Tu iras toujours me chercher ? -Oui. -Jusqu’à la mort ? -...Oui. -Tu mens. »
Moi, j’ai eu envie de revisiter le quartier artistique de Mo Gan Shan Lu, aujourd’hui portant le nom de «
Il dit que bien des ouvriers eurent dû subir du chômage, Xia Gang, mais qu’aujourd’hui, arrivés tous à l’âge de retraite, ils vivaient correctement grâce à la sécurité sociale actuelle.
--Et vous, Monsieur, que faisiez-vous ? Ouvrier?
--Oui, ouvrier. Ah...j'habite ici depuis long.
--Et, là, vous vous promenez ?
--Promener, hélas, oui... Attends la mort ! Il se moquait en souriant.
Tout le monde attend la mort, Monsieur. Le faire dans les promenades aux bords de l’eau, c’est du bonheur. Mon père est comme vous, Monsieur. Ouvrier. Vous êtes bons hommes, vous, les anciens ouvriers shanghaiens ; vous qui avez éliminé de votre dictionnaire tous les termes concernant le bonheur, vous ne vous anéantissez pas, pour autant.
Les barrages sont transformés aujourd’hui en passage de promenade joli et propre. Monsieur l'ancien ouvrier continuait à nous parler de
A un autre moment, on cherche « la scène d’opéra ancienne» comme ce qu’est indiqué sur le panneau, tandis que l’on ne voit que les salles. Neige dit qu’hé alors, les anciens jouent l’opéra dans les salles ? Je dis que ce devrait être vers le fond de la cour, que ce serait les planches avec quatre pieds en bois.
Nous y sommes. Les planches, trop sobres pour être intégrées au climat du jardin, se sont retirées à la moitié sombre de la cour. Dès que je les ai vu, je me trouve de nouveau hantée par la mémoire. M’est survenue l’illusion d’une figure mince et petite, assise sur les planches et qui dessine.
(En écrivant ce billet, je fais référence à l'article publié sur Lemonde.fr: "Pour la Chine, la France est le maillon faible de l'Europe.")
Je ne comprends pas pourquoi les deux Continents ne se comprennent toujours pas sur un même problème, celui du Tibet; pourquoi les dialogues de sourds entre les spécialistes géo-politiques français et les chercheurs historiques chinois se poursuivent et les querelles restent les mêmes.
Q1 : Pourquoi
Argument 1 : selon Monsieur le spécialiste de
Argument2 : Gordon Brown et Angela Merkel ont tous les deux reçu Dalai et ne se sont pas rendus au JO de Pékin (mais ces deux chefs ont-ils lié leur absence à la rencontre avec Dalai?), mais
Conclusion : « ils(les Chinois) ont trouvé où le coin allait rentrer. » :
Q2 :
« Historiquement », souligne-il. Oh lala, quelles perspectives précieuses. Il critique alors les diplomates français qui ont une vision «totalement déconnectée de la réalité ». Qui ça, ces diplomates déconnectés ? Paul Claudel ? Victor Segalen, ou encore Henri Michaux ? Autant critiquer la littérature moderne de
Q3 : « le concours d’excuses »veut dire donc la soumission à Pékin ?
Monsieur le spécialiste de
Q4 : « Ils n’ont pas eu à l’interpréter ! » ?
Vous êtes trop efficace, Monsieur le spécialiste de
Q5 : Qui êtes-vous, Monsieur le spécialiste de
Vous êtes bon spécialiste de
C’est pour cela que vous êtes imprégné des stratégies militaires de nos ancêtres ? C’est pour cela que vous dites que
Enfin, vous alliez me demander mon avis sur cet incident politique. J’épargne un peu mon espace, je propose simplement l’article de presse de l’Ambassade de France en Chine (plus ou moins ignoré par la presse chinoise) , avec lequel je suis d’accord. Et je dis simplement ceci:
Chine, méfie-toi de toi-même.
France, dé-brouillez-vous !
Je me ferais moquer par les gens des deux pays en disant cela. Mais ça a peu d'importance.
Bon dimanche .
一切的类似,
Tous égaux,
一切的不同,
tous différents,
都融合一处,
tous unis,
为了一个宽容的世界
pour un monde de tolérance.
Totem de la tolérance
--réalisé par le Conseil des enfants du 4e , juin 2007
Sais pas que le métro de Shanghai termine à 22H45.
Sais pas où me diriger devant les travaux collectifs à Pudong.
Sais pas respirer dans les poussières.
Sais pas refaire la chambre à moi
Sais pas ranger ma bibliothèque en tas
Sais pas sceller les journaux intimes
Sais pas dérouler le certificat.
Sais essuyer les poussières.
Sais contempler la vieillesse et le délire.
Sais me demander, que faire à l’a-venir ?
Jamais trop tard.
Shanghai est devenue un grand chantier. Les gratte-ciel poussent comme les herbes folles. Les gens commencent à prendre le passage piéton et attendre le feu vert pour traverser la rue, mais j’ai risqué la vie pour me rappeler que les voitures ici ne laissent pas passer en premier les piétons et qu’il faut regarder, à gauche puis à droite, en traversant. Les klaxons, moins terribles que j’avais imaginés, me semblent une toute nouvelle chose, tellement que j’ai le sentiment d’être dans le cinéma(ce ensorceleur...) de Jia Zhangke, celui-ci étant d’une réalité réaliste. En me déplaçant, j’ai dit pardon dans l’air et j’allais dire bon soir au chauffeur à l’abord du bus. J’ai fini par échanger un sourire passager. Ce drôle de sentiment et de réflexe.
Et Shanghai de même.
Telle une bonne question.
Moi, je repars demain pour
Je ne me déplore pas, ce dernier séjour en France n’a pas du tout été prévu depuis mon départ pour UK, et c’est grâce à la gentillesse de la dame de l’Ambassade de France en Ecosse que j’ai pu rester aussi longtemps. Pour autant, cette durée ne me suffit pas pour trouver un travail que je veux, il faudrait un temps plus long pour se préparer et pour trouver un boulot intéressant.
Quand il s’agit de l’amitié et des rencontres, en revanche, le temps ne s’impose pas nécessairement. On peut se faire des amis avec les coups de foudre, les événements et les topic intéressants, les quelques espoirs pour
Paris m’a aimé, voire m’a gâté. Les expositions superbes que j’aimerais vous en parler, les projections, les dialogues avec les gens de la politique, de la société, du cinéma et de l’éducation, les activités associatives auxquelles j’ai pu contribuer : les Français qui donnent des aides sociales aux femmes dans les régions défavorisées de
J’ai aimé Paris aussi. Je l’ai aimée non pas comme ville touristique, mais comme un lieu où se croisent les gens et les voix, les idées. Son charme.
Je repars en emmenant de petits boulots, des projets à venir, des amitiés à distance, des promesses : dites ou non-dites, aux autres comme à moi-même. Continue, l’écriture.
On dit : ne choque pas trop tes compatriotes. Je dis hélas...au pire, on se choque.
On dit : triste de partir ? Je dis je suis prête.
La seule pureté est la nudité du corps de Charlotte Rampling, alors femme parfaite et qui, aujourd’hui n’étant plus jeune, a toujours du charme, comme l’on peut constater dans Sous le Sable de François Ozon : dans ce dernier, curieusement, Rampling reste aussi profondément seule et attend en vain le retour de son mari à jamais disparu à la plage.
La féminité doit-elle être aussi forte que cela, pour que tous font le sacrifice, au sens religieux du terme, et qu’elle seule continue à vivre...mais quoi ?
Les témoignages : Tai Shi Cun
Tai Shi Cun me semble moins un documentaire qu’un reportage journalistique. Ce qui impressionne, c’est que, depuis le début, une forte conscience du droit se constate chez les villageois qui veulent démissionner leur chef par les moyens judiciaires. Ils s’agitent en revendiquant leur droit de propriété de la terre, eux qui n’en peuvent rien face à la corruption administrative. J’en suis bien émue. J’avoue que moi, je connais peu de choses sur les feuilles qui indiquent les procédures administratifs pour cela. Après les pétitions, les occupations silentieuses dans le bureau du comptable des femmes et des vieux (par crainte que l’autorité ne manipule sur les comptes administratifs qui serviront de preuve, disent-ils) qui seraient mis en garde de vue et maltraités par les polices locaux, un suffrage direct a finalement eu lieu. « un cas typique du progrès de la démocratisation de
7 villageois ordinaires ont été élus, parmis eux, aucun des candidats recommandés par le gouvernement local. Triomphe de la démocratie directe, allait-on dire. Or les choses se transforment aussitôt en drame, lorsque les 7 élus ont disparus le lendemain de l’affichage du résultat du vote : ils auraient bien sûr subi les poings des puissants locaux, avant de jurer qu’ils renonceraient à leur nouveau statut administratif. Ni le journaliste qui parle un mandarin standard ni les médias locaux ne seront plus présents, un journaliste qui fait le reportage depuis le début est emmené sous les yeux des villageois, un avocat jeté dans la prison, devenu le bouc-missaire de tout l’événement. Sur scène, il ne reste qu’une caméra organe qui aurait tourner en gros plan les visages des militants et qui ferait des trucages d’un « émeute organisée par une minorité de rebelles à Tai Shi Cun contre l’intérêt de la majorité populaire » : sans prétention, en écoutant les premiers mots de cette définition, on saurait réciter l’information complète annoncée par le journal autoritaire du local.
Heureusement il y a une autre caméra hors-champ qui continue à tourner les images qui elles-mêmes commencent à s’agiter, alors que l’agitation des villageois se transforment en angoisse et en peur à force des jeux arrêt-délivrance du pouvoir local. Le silence règne. Les témoins renoncent à offrir les preuves aux deux avocats-conseil bénévoles. Un progrès sans suite.
La caméra accompagne depuis le début les deux avocats. Ce sont deux héros qui n’ont pas du tout l’air héros. Quel sang-froid devant la pression implicite et le danger qu’on peut imaginer. Surtout cette femme avocate qui devrait avoir une quarantaine, elle parle d’un ton soulageant et tout calme vis-à-vis des villageois angoissés et qui perdent leur sens. Personnellement, cette image fémine et protectrice me rappelle tout d’un coup la scène où ma mère parlait avec ses plaignants qui étaient aussi angoissés lorsque j’étais petite ; à elle qui m’a quittée il y a bientôt dix ans, j’aurais tant aimé demander sur ce dont elle pense de l’administration en général et de celle qu’elle avait connue. Comment justement garder constamment le sang-froid face aux réalités dramatiques ?
Le sang-froid ne se garde peut-être pas pour toujours, quand on vit vraiment dans une société. Vers la fin, les villageois s’interdisent de parler avec les deux avocats, à cause de l’entourage d’une dixaine d’inconnus. N’ayant pas pu entrer dans le village, les deux avocats qui se prètent à quitter ont été harcelés par quelques hommes qui les chassent en moto. L’angoisse intérieure s’aperçoit à travers les pas accélérés des deux avocats, qui ont su pourtant se maîtriser dans une telle situation. Appels aux secours inutiles, auxquels s’ajoute l’humour noir d’une voiture de police qui se casse lorsque les deux avocats s’en approchent : bonne fable du chat qui a peur des rats.
Menace de mort : les hommes arrêtent le taxi qu’ont finalement trouvé les deux avocats (et Ai Xiaoming) en brisant les vitrines. Ecran noir qui termine ce tournage, reste le remous qui bouleverse plus ou moins les spectateurs.
Les Testaments enregistrés: The Epic of Central Plains, Care and Love
Les deux films montrent et laissent raconter les patients VIH positifs ou atteints du SIDA, non à cause des relations sexuelles ni de l’injection des drogues, mais à cause de la transfusion sanguine dans les hôpitaux, cette troisième cause étant négliée délibérément dans la vulgarisation des connaissances sur SIDA de la région. Ces gens ont été isolés dans un village appelé désormais le village du SIDA, au Hebei, subissant la méfiance des « normaux », la perte des ressources de vie et la mort qui s’annonce au jour le jour.
A la différence de la présence de la violence dans Tai Shi Cun, ces deux films s’interrogent davantage sur la morale administrative et sur les problèmes sanitaires qui enlèvent le moindre sentiment de la sécurité des gens qui y vivent. Simple histoire de bonne face à garder et les scandales en chaîne à dissimuler par l’administration locale, ce qui conduit pourtant à un plus grand nombre des malades affectés, parmi lesquels les paysans pauvres qui ont dû survivre avec la vente du sang, devenue « donation récompensée du sang » sous le jeu socio-linguistique.
Dans le premier film, les victimes n’ont pas trouvé des moyens pour faire part du crime moral des hopitaux en question ou pour mettre en cause des politiques de l'Etat qui refuse l'aide internationale des ONG qui puissent fournir des médicaments plus efficaces contre la maladie ; les actes bénévoles qui font les enquêtes auprès des familles-victimes ont été empêchés et les pourvois rejetés. Dans le second, une certaine récompense ont été versée aux certaines familles victimes, sous l’effort des avocats et des membres familials des victimes qui parviennt à monter à Pékin pour le procès, malgré les entourages malveillants : apparemment, il s’agit d’un cas de contamination dans « l’hopital le plus connu(non nommé) » de la capitale.
Ce qui m’intéresse le plus à travers ces films, c’est quand même ce qui s’ensuite de ces dénonciations, qui ne choquent plus beaucoup de monde, tout comme l’affaire des producteurs laitiers de SanLu : y a-t-il eu l’amélioration de la qualité des produits sanitaires dans les hopitaux? Et l'amélioration de l’inspection sanitaire ?
La réponse de Ai Xiaoming à cette question est « plutôt oui ».
Une autre question qui se pose parmi les spectateurs : est-ce que ces oeuvres ont pu être projetées publiquement en Chine ?
Oui. Mais s’entend : publiquement ne veut pas dire officiellement ; pas question d’une projection dans les salles de cinéma si l’on a une moindre connaissance sur les politiques culturelles de notre pays. Mais circulation et projection libérales entre les amis, dans les campus, parmi les journalistes et les avocats, etc sont possibles. Puis, s’ajoute Mme Ai, « j’ai aussi offert quelques copies au Chef du Bureau sanitaire et au Chef du gouvernement local ». Applaudissement.
« --Pas de danger comme ça ? »
« On se radicalise pas. Seul ils touchent les topics sensibles ou taboux. Ces films ne sont pas contre le pouvoir mais un avertissement à notre système administratif et sanitaire, et un compte rendu du point de vue historique. Nous avons d’ailleurs pris la réserve pour couper les scènes les plus aberrantes de la part administrative : de leur garder un peu la face pour qu’ils puissent continuer à travailler et que nous puissions continuer à tourner et à vivre. »
Comment dire quelques mots sur ce festival ? Comment parler de ces documentaires qui s’interrogent sur les grandes H de
De vendredi dernier jusqu’à lundi, j’ai assisté à la projection de plusieurs films documentaires des deux réalisateurs, Mme Ai Xiaoming et M. Hu Jie, l’une étant professeur de lettres chinoises, spécialisée dans les questions de la féminité à l’Université de Zhongshan(Ganton) ; l’autre, ancien journaliste qui a dû renoncer à son poste chez l’agence Xin Hua à cause de ses tournages. Si, dans les films projetés, Hu Jie a privilégié une vision historique en prenant le risque pour tourner les documentaires qui représentent une Histoire de la minorité des victimes subis des persécutions inhumaines à l’époque de
Les films : In Search of Lin Zhao’s Soul, Though I’m gone
Sans doute grâce à sa formation en peinture, les images sont relativement mieux tournées dans les deux documentaires de Hu Jie. J’ai notamment été impressionnée par la coloration de la toile sur laquelle sont écrits les poèmes par Lin Zhao avec son sang : le rouge orangé qui donne le sentiment à la fois violent et épique. A part cela, Hu Jie a pris l’initiative de dessiner devant la caméra, selon la description d’un ami de Lin Zhao qui est allé la voir dans la prison au risque de sa peau, un portrait de l’héroïne dont le visage est enrobé de manière très sérrée afin d’empêcher que celle-là ne crie à haute voix les slogans contre le pouvoir : autour de la bouche, ça serre, alors au fur et à mesure, Hu Jie y ajoute de plus en plus d’ombre. Un processus asphyxiant, et résultat : il y a et il n’y a que les yeux qui brillent et qui respirent difficilement.
Mais là n’est pas la vraie question. Le documentaire, comme ce que disent les deux réalisateurs dans la discussion après la projection, est moins une recherche esthétique qu’un moyen d’observation, de témoignage, d’enregistrement de la société chinoise d’hier et d’aujourd’hui. Ainsi, à part cette histoire sur la figure presque monumentale de Lin Zhao, dont le dossier est toujours enfermé (probablement à Shanghai où elle a été fusillée) et qui semble demeurer un topic-tabou, dans Though I’m gone, l’époux de Bian Zhongyun, alors vice-présidente du lycée pour filles attaché à Bei Shi Da, remémore comment cette dernière a été frappée jusqu’à mort par ses étudiantEs aux premiers jours de
Les lecteurs parisiens et les lecteurs de passage à Paris, profitez-en pour aller au Festival Shadows et découvrir les documentaires chinois, souvent des thèmes engagés, rarement projetés à l’international et jamais projetés publiquement en Chine ! Et notamment à relever les oeuvres de deux réaliateurs, Mme Ai Xiao Ming et M. Hu Jie.
Vous trouverez les renseignements sur la programmation et la présentation des films projetés ICI (cliquez sur le "Dossier de presse")
***
En début de la semaine, je me balade dans la rue et je lis sur l’écran d’annonce de
En rentrant je prépare une lettre pour le bénévolat. Le lendemain, c’est un peu de la chance, je suis devenue la dernière bénévole pour l’événement. Je peux dire déjà qu’on n'apprendra pas autant de choses dans les missions à accomplir, toutes assez fondamentales, que dans la participation même du festival et surtout dans les rencontres qui sont très très enrichissants. A suivre !
J’ai répondu à quelques annonces en RH, écrivant quelques lettres de motivation qui me prennent la tête, sans espoir aucun pour la suite. J’ai eu deux trois appels, ce qui est déjà hors d’attente. Puis, lors de
Une fois, quand je sens qu’il n’y a aucune possiblité que mon interlocuteur relise mon CV, j’ai fait un peu les interrogations-suicide à ce pauvre monsieur sur les différents métiers de RH, de communication, de l’assistanat administratif. Il a fini par dire : « vous ne donc savez pas ce que vous allez faire ? » Bingo monsieur, vous avez bien compris mon angoisse, et merci pour les renseignements.
Je me rappelle d’un dialogue très agréable avec une représentante au stand d’un cabinet de RH international :
--J’ai suivi les études du Master Erasmus Mundus, dans 3 pays européens.. [...] et St Andrews en Ecosse.
--Ah, St Andrews !
--Mais vous le connaissez ?
--Eh oui, c’est sublime ! ...Vous parlez anglais aussi ?
--Oui, j’assiste en général les cours dans la langue locale.
--Comment est votre anglais ?
--Urh...comme mon français.
--Votre français est bon !
--Urh...oui Madame. [...] Comme votre cabinet est à l’échelle internationale et que cela correspond bien à mon profil et à mes expériences, je désire [...].
--En effet, votre profil est très intéressant pour nous. [...] Comme les postes en RH et recrutement sont pleins, ce que je pourrais vous proposer comme possibilité c’est de travailler dans l’une de nos antennes comme assitante-directeur aide d’emploi, c’est-à-dire de distribuer les emplois à des chômeurs...
(--Waouh...Redistribuer les chômeurs dans les différents emplois ? Intéressant comme un travail dans le bureau d’immigration ! Ca fait découvrir le bas-monde en France !) Eh oui ça m’intéresse !
--Vous êtes mobile en France?
--Bien sûr !
Je sais qu’il y aurais très peu de chance que je sois retenue pour ce poste, mais déjà ce genre de dialogue est encourageant, c’est d’ailleurs la permière personne qui jusque là reconnaît ce diplôme trop général et peu « utile » aux yeux professionnalisés.
Avec ces détours, la décision est donc prise ? Presque, je dirais, car je me connais bien(quelle prétention !), moi qui changerais l’idée à tout moment et dans tous les sens. Il serait mieux de m’accrocher sur la culture, que ce soit en France ou en Chine : le cinéma, la coordination événementielle, ou l’édition, qui sait. On me dira : mais si t’auras un poste dans d’autres domaines qui te permettra de rester en France ?
Hé bien, attendons au moins qu’un entretien tombe devant moi avant que les choses ne s’avancent pour que j’apprenne à faire le choix !
Paris vous m’aimez ?
Combiens de billets que j’ai manqué ? Depuis mon arrivée à Paris, je n’arrive pas à trouver de bon moments pour écrire. Soit il fait trop de bruits dans l’appartement d’une ancienne camarade de classe qui m’a très gentillement hébergée, soit je me trouve angoissée par la chasse aux métiers.
J’avoue qu’il m’est encore assez difficile de sortir complètement de mon statut étudiant-chercheur pour devenir une bonne « professionnelle ». En me renseignant à gauche et à droite sur les métiers, je m’égare momentanément sur les questions purement intellectuelles et idéologiques, je me laisse fasciner par tels ou tels romans(ah mais comment se fait-il que Echnoz a publié tellement de romans en peu de temps ? Ou bien je me suis enfermée pendant trop longtemps ?), par tels ou tels prix littéraires qui me poussent automatiquement au lancement de la lecture des critiques(Humm, Jean-Marie le Clézio, n’est-ce pas séduisant, le clivage, le doublement et le dédoublement de soi, le trouble identitaire, les moqueries sur l’administration de l’état civil ? Etc, etc, etc.).
Il y en a bien qui me disent, pourquoi pas un doctorat direct, vue ta situation délicate pour trouver un boulot en France ? De faire un doctorat, à priori à Paris, me permettra de prendre du temps pour découvrir le milieu culturel auquel je veux rentrer, il est vrai, mais je préfère attendre un peu pour préciser mon sujet de recherche en évitant l’égarement, pour déouvrir la moi sociale qui se diffère forcément de celle qui est soit hyper-mobile(donc trans-sociale), soit hyper-sédentaire(plutôt a-sociale). Pour trouver ce qui me plaît vraiment aussi, dans plusieurs possibilités de travail, pour continuer à vivre et à m’épuiser.
« T’aurais pu t’inscrire pour un autre master, n’est-ce pas ce que tu veux aussi ? » me dit-on. Oui, j’aurais bien aimé, sincèrement, cela me ferait largement du bien si je pouvais me « spécialiser » encore un peu. Mais ! Mais que puis-je faire si ce n'est plus la saison d'inscription? Maintenant que j’ai le visa d’étudiant jusqu’en fin novembre, ce qui est encore une chance grâce à l’Ambassade de France à Edimbourg, je me contente de ces deux mois de plus du séjour. Et si la vie s’est mise hors du rail, s’est dramatisée, tant pis, on s’improvisera, et il est bon d’apprendre à s’en amuser.
Après une première semaine de recherche, j’ai compris qu’il n’y a vraiment pas beaucoup d’opportunité en France pour une jeune diplômée étrangère, en sciences humaines et sans stage. Au bout de la deuxième semaine, j’ai perdu gravement l’idée du métier sur lequel je vais tenter mes chances : les métiers culturels, les plus séduisants, ont peu d’offres, sans parler des problèmes du financement des associations indépendantes. Alors pourquoi pas la communication, sinon les ressources humaines, ou encore l’administration, qui aidera à découvrir un peu le système social ?
Je me laisse entendre parler. Il y en a qui disent qu’il faut vraiement accrocher sur un secteur/domaine pour le 1er emploi parce qu’il sera difficile de se réorienter sans les argumentaires suffisants ; il y en a qui me conseillent vivement d’essayer de rester en France et de vivre davantage les expériences professionnelle et personnelle, quel que soit le métier. Il y a aussi quelques amis chinois qui disent : Comment ? assistante ? secrétaire de direction ? Ca te mérite pas ! Mais c'est d'exagérer un peu. C'est quoi déjà le mérite ? A chaque poste il y a des choses à découvrir et des qualités à développer, non ? C’est en ce moment-là que je rends compte du cap mental qui aurait existé entre ceux qui pensent en hiérarchie professionnelle et sociale et moi qui aimerais essayer les postes de base qui rentrent en contact avec les gens de toutes sortes. L’amour du métier, hélas, l’amour du métier.
On me dit, if you really like it, head for it. Je ne sais si j’ai encore ma tête avec moi, mais en effet, c’est ce qu’il faut. Go. Go a head.
Mais Barcelones semble être incontournable. Et l’Espagne me séduit. C’est alors décidé. Je remets le mémoire et je réserve les billets et l’hostel et je pars.
La visite des villes modernes me semble assez délicatee, ce qui n’est pas comme un voyage en pleine nature où l’on peut se jeter entièrement dans la montagne, dans les eaux ou dans les forêts. Il faudrait parfois privilégier le paysage urbain, parfois la causerie avec les gens, ou encore les héritages immatériels. Barcelone est le dernier cas pour moi.
Cette ville me déçoit au début. Plus catalane qu’espagnole, plus mondernisée que traditionnelle. Encore une fois, je pense à Shanghai, à Liverpool aussi, à Dublin, à Marseille. Les villes modernes se ressemblent plus ou moins au niveau de l’urbanisme, sauf que les coins d’attirance de certaines villes peuvent être parcourus à pieds, ce qui est le cas pour Barcelone. Les Rumblas, ça ressemble pas à la rue de Nankin ? Sauf qu’il y a les statues vivantes dans la rue. Le marché couvert de Boqueria n’est pas tellement différent que celui en bas de chez moi à Shanghai, sauf qu’il y a des fruits tropicaux qui sont toujours alléchants. Quant au quartier gothique, vraiment, je préfère les ruelles italiennes de
Les gourmandises ? le tapas, j’ai l’idée même que je pourrais le faire moi-même. Le Paëlla, j’en trouve de bons au marché de dimanche à Perpignan. Les piquants, non, ils ne me plaisent pas. Alors à quoi bon le voyage ? A quoi bon ?
A ceci que les découvertes architecturales m’émerveillent, encore plus que celles des oeuvres de Picasso. Gaudi, quel miracle, Gaudi. Avant de contempler longuement les sculptures de la façade de
C’est à
Et pour moi, c’est ça Barcelona.