09/02/2009

En rond

"Mais pourquoi vous prenez les pizzas pour yuan-xiao jie?" "Hé bien parce que c'est rond, et parce que c'est bon."


Viens de rentrer à la maison. Suis crevée, mais suis fascinée par cette fête des lanternes qui serait l'une des plus belles, et exceptionnelles, dans ma vie.

Il y a deux ans, ayant reçu François Cheng à Bergamo, j'ai bien retenu la date de la fête, dernière journée des quinze premiers jours du calendrier lunaire de cette année-là. J'ai fait pourtant des bêtises en souhaitant, au couple de Cheng comme aux proches, une bonne fête de la lune. "T'es dans la lune, toi? On est la fête des lanternes!" Me moquait alors ma cousine via Internet.

Je crois que ce n'est pas tout à fait de ma faute, car...hé bien élevez la tête et voyez la lune au jour de la fête des lanternes: c'est rond! C'est rond n'est-ce pas, et ça évoque la réunion familiale, l'unis, etc.

Ce deuxième jour de mon premier travail, lors du déjeuner, la chef du bureau, femme qui a une personnalité admirable à mes yeux, qui va directe, honnête, ouverte, sévère, et drôle, nous parle de la soirée qu'elle va tenir à la maison. "Nous allons avoir les pizzas, moi je ferai les pates, M. X fera la sauce bolonese et c'est de la maison, puis les raviolis chinois, et bien sûr les tang-yuan, ou yuan-xiao, je sais pas, appelez comme vous voulez... Et la question se pose, les pizzas pour les lanternes, ça fait pas bizarre? Hé bien parce que c'est rond, et parce que c'est bon.Voilà! ...Tout ça pour dire que, si vous voulez, venez."

Je ne sais pas de quand ça date, mais je me trouve pour la plupart du temps parmi les gens qui bougent dans plusieurs continents, les couples mixtes, les familles migratrices. C'est avec ces gens-là que je me sens plus à l'aise et ai moins besoin d'expliquer les choses. Et en même temps leur vie m'est enviable. Je sais que les agitations géographiques vont me suffir un beau jour, qu'il se peut que je m'acquière une vie de stabilité comme la majorité le font; mais néanmoins, une vie autrement riche, incessament renouvellée, improvisée, vitalisée, m'aspire. Ce n'est point impossible, une telle vie, les gens diplomatiques, journalistiques, littéraires, artistiques que j'ai rencontrés m'ont fait déjà témoigner pleines de possibilités convainquantes. Il faut essayer de rendre pleine la vie, quel que soit l'état d'âme, et de la bien tenir dans notre propre main.

Ce soir, l'occasion ne m'est point inconnue: celle des Mundis, mundus au pluriel et au sens large qui désigne tous les migrateurs internationaux du monde. Les nationalités ne se compte pas aussi nombreuses que celle des étudiants Mundus, certes, ici on a Chine, Russie, Italie, France, Etats-Unis. Mais de différentes sortes de combinaisons peut se composer: né(e)...d'origine...qui habite...de nationalité...qui a travaillé dans...qui s'est marié à... qui est copain(e) de...qui ont séjourné en...Ainsi de suite. C'est une sorte de vie de luxe, si je puis dire, qui privilégie les gens qui ont un travail qui plaît, et qui vit, expérimente, crée, voyage, s'apaise, qui se débrouillent autant pour supporter les pressions, les solitudes, pour se confronter à toutes sortes d'emmerdements, fût-ce commutable aux émerveillements.

Dans la cuisine,(et ce genre de cuisine équipée qui me manque, depuis mon retour je n'ai jamais pu reprendre mon habitude de faire quotidiennement la cuisine) devant la machine à pâtes et la sèche-pâtes, les gosses s'excitent à se montrer futur(e)s chefs de cuisine: faciamo la pasta! Il faut rendre fin les pâtes, de 1 à 5, avant de les couper, en faire de petits rideaux de pâtes pour sécher. En parlant de la cuisine, il faut bien parler de la tactique et de l'art: comment donc couper l'onion sans pleurer, quels ordres à suivre pour rentrer mijoter les légumes primo et de la viande secundo, et comment respirer proprement pour profiter de ce délicieux odeur méditerranéenne tout en luttant contre la faim?

L'une des solutions pour la dernière question: regarder les petits. Les petits beaux comme les stars, et les petites hyper hyper mignonnes ou/et drôles. Des bilingues aux quadrilingues, dont la vitesse d'apprendre le chinois impressionne leurs parents.

L'heure du dîner, comme tant d'autres, c'est pour manger et discuter. Après, il faut sortir allumer les feux d'artifices et les pétards. On a je crois 2-3 grands cartons à finir. Je n'ai jamais allumé autant de feux d'artifices en une seule fois. Tous descendus, adultes, et petits angels mixtes qui au début ont tous peur et après font tout ce qu'ils veulent.

La suite des scènes est à la fois enivrante et féerique. Il suffit de rester là, regarder la douceur et le bonheur pur sur les visages allumés des petits, leur figure craquante colorée des feux d'artifice; et de rire des caprices qu'interprètent les bons hommes qui font pour la première fois cette fête des lenternes allumés par eux-mêmes. Et les étoiles, les étoiles qui clignotent et qui se lancent haut, éphémères, dans les cieux de la pleine lune.


(les lanternes rouges suspendus à la façade des tours d'habitation;
photographiées dans un quartier à Pékin; jamais vu ça à Shanghai)

1 commentaire:

Anonyme a dit…

C'est bien que tu te retrouves parmi les gens qui te plaisent.
Bon séjour à Pékin!